Chemin Stevenson

Randonnée sur le chemin de Stevenson GR®70 du Puy-en-Velay à Pradelles en Haute-Loire via Coubon, Le Monastier-sur-Gazeille, Le Moulin de Savin, Le Cros, Saint-Martin-de-Fugères, Goudet, Ussel, Bargettes, Le Bouchet-Saint-Nicolas, Landos, Jagonas et Arquejols.


GR®70 Du Puy-en-Velay à Pradelles (Haute-Loire)

Haute-Loire

 

Catherine Revel et ses ânes

À quoi pensais-tu, à qui rêvais-tu en t'engageant sur le Chemin Stevenson ? Où déambulais-tu la veille de ton départ ? Ce soir, je pense à toi. Voyais-tu, promeneur solitaire, dans le village endormi, les lumières du ciel, éclairage infini sur ton projet indéfini ? Imaginais-tu les rêves fatigués ou joyeux des passants croisés à Le Monastier-sur-Gazeille, ces inconnus aux paupières closes derrière les volets fermés de la nuit ? Ou bien, un être cher occupait-il tout le fond de ton cœur ?

Et moi, qu'est-ce que je cherche dans ce voyage ? Qu'est-ce que j'admire en parcourant ce soir les ruelles étroites de Pradelles ? Elles sont parsemées ici et là de ronds de lumière artificielle, masquant des recoins sombres où l'on s'attend à voir ressurgir le passé, en effleurant ces vieilles pierres séculaires imprégnées d'histoire. Des ruelles étroites enfermées entre des murs étroits, interrompues par des petites places ouvertes vers l'espace lozérien, vers la nuit de la Bête du Gévaudan, ville fantôme dont les lueurs s'échappent sous un toit de brouillard, à la fois en le transperçant pour aller plus loin et en le teintant, mais s'y arrêtant, incapable de pénétrer cet autre monde. Leur blancheur s'enfonce vainement dans l'obscurité.

Haute-Loire GR®70 StevensonJ'attends, j'écoute cette soirée et les jours à venir. En sortent le son des cloches de troupeaux, à moins que ce ne soient des souvenirs d'un autre âge, ressuscités en cette soirée impénétrable pour une solitude plongée dans un temps qui n'est pas le sien. Le temps, l'espace, tout me semble présent. Sous la chapelle Notre-Dame, mon regard levé est attiré par les rayons rouge orangé qui s'échappent vers le ciel. Un petit parc domine le village, où le promeneur, regardant vers le bas, voit la vieille ville endormie sous ses lumières modernes, et la statue de Marie, détachée par l'éclairage, regarde avec lui ces familles endormies dans leurs chauds intérieurs et sous l'obscurité.

J'espère que ces documents vous transmettront de beaux souvenirs. C'est leur unique objectif. Voici un récapitulatif de nos étapes :

Anes GR®70 StevensonNB: Les distances et les dénivelés ne sont donnés qu'à titre indicatif pour ceux qui aimeraient se faire une idée de ce que cela représente pour les jambes, mais l'essentiel réside dans les yeux et le cœur !

L'ensemble, écrits et images, n'engage que la perception de l'auteur, même si je dois de grands remerciements pour la confection de ce petit souvenir à tous les "photographes" du groupe : Denis, Pierre et Laurent, ainsi qu'à tous les "sujets" photographiés : Annie, Christian, Gisèle, Philippe, Renée, et à tous pour votre compagnie dans ce voyage, pour vos regards, sans oublier Keneth et Popov (!), et à tous ceux qui nous ont accueillis.

Première journée, démarrage. Lever matinal à Pradelles, rencontre joyeuse autour d'un café serré, ou plutôt de plusieurs, au comptoir du café avec Gilles Romand, propriétaire des ânes, son épouse et quelques habitués ; Et c'est parti ! La camionnette quitte la route principale pour s'enfoncer dans le brouillard sur un chemin de terre entre landes et pins. Un passage dans la clôture, nous y sommes, pas d'ânes en vue, mais à l'appel de leur maître, toute une troupe surgit dans le brouillard.

Sur le GR®70 StevensonJoyeux et beaux, ils sont venus dans leurs robes grises, perlées d'humidité, calmes et élancés, plus grands que mon imagination. Keneth et Popov sont les élus qui vont accompagner le périple de dix jours ; confiants, ils se laissent passer le licol et entraîner même par moi qu'ils ne connaissent pas et qui n'ai jamais touché un âne. Je me sens un peu coupable et traître de profiter d'eux, de leur confiance, de les enlever à leur tranquillité, à leur liberté. Monter dans la camionnette va d'ailleurs moins de soi. Et de retour à Pradelles, nous commençons à faire connaissance par mon apprentissage en termes de harnachement, d'autorité, de conduite, car dans moins d'une heure, ce sera à mon tour de faire la démonstration !

Mes regrets de n'être pas venue pour une journée d'entraînement s'accroissent ; heureusement, Gilles Romans se veut rassurant et plus confiant que moi sur mes aptitudes, mais j'ai aussi à l'esprit quelques craintes quant aux bagages de mes compagnons de route et leur patience, leur goût pour la compagnie animale, eux qui vivent en ville. Et puis, nous sommes en retard et j'espère que pour un rendez-vous fixé d'aussi loin dans le temps et l'espace, cela ne créera pas trop d'inquiétude. Je m'en veux d'autant de ne pas être arrivée assez tôt hier pour ce petit cours.

Enfin, après la course des préparatifs de mon départ de Toulouse pour plusieurs mois, la maîtrise du temps n'est plus en mon pouvoir et l'attente heureuse, le bonheur de ces rencontres, de ces moments hors du commun sont seuls importants, et après un dernier café, la détente vient et malgré les soucis de mon conducteur par rapport au niveau d'essence et le retard qui s'accroît, j'apprécie le trajet, réalisé au ralenti pour respecter les ânes, dans ce Velay inconnu et brumeux.

C'est le début d'un grand voyage, l'inauguration d'une année particulière loin de Toulouse et de son hôpital (où je suis infirmière).

Une pompe résout le problème de carburant et les virages d'une plus petite route s'enroulent près de la Loire, heureusement non noyée par EDF m'explique mon guide. Il fut question de la construction d'un barrage ici. Autour de considérations sur la vie ici ou citadine et les champignons.

 

Le Monastier sur Gazeille GR®70 Stevenson1er jour: 22 km, +730m

Voici Le Monastier sur Gazeille. L'intuition nous conduit directement vers le reste du groupe pour la rencontre souriante avec les ânes. Les questions fusent et moi, je me dis : « Quelle idée d'embarquer d'autres personnes avec mon inexpérience des ânes ! Quelle belle aventure ! ».

Observation, curiosité et réflexion mènent le chargement, moment un peu difficile où l'on se demande comment agencer tout un tas de sacs et que supprimer pour y arriver ; j'aurais dû être plus claire, pour la prochaine fois ce sera mieux.Mais la bonne volonté vient à bout de tout, et du pied de la petite église romane du Monastier sur Gazeille, l'aventure démarre sous la conduite de Philippe et moi qui tenons les ânes, à moins que ce ne soient de la leur car on se demande qui mène qui, parfois ! Tout de même, c'est un joyeux départ, le village reste derrière sans un regret.

GR70 Stevenson Le Monastier sur GazeilleLes ânes, patients marchent plus ou moins pressés, intéressés par les herbes et surtout les broussailles au bord du chemin. Ils répondent à nos paroles par des mouvements de leurs grandes oreilles, par un regard attentif ou par un désintéressement autrement motivé par la gourmandise. Un chemin parsemé de pierres rondes et sombres, limité par des murets de même teinte nous guide sur une terre volcanique montant entre des haies au départ, puis plus à découvert en traversant des villages du Velay.

Le ciel couvert habille ce pays noir et vert, courant au-dessus de ses couleurs contrastées, élevé par ses dômes. Des tâches plus sombres sont générées par de rares pinèdes entre les carrés cultivés de couleurs brunes et vertes variées. Quelque part derrière nous se trouve le Mézenc, mais ce manteau le masque. Les ânes aimeraient bien grignoter si nous leur en laissions le temps. Nous nous rendons vite compte de la justesse des recommandations reçues au matin, il ne faut pas leur laisser prendre de mauvaise habitude, la tête est vite abaissée vers quelque brindille et la redresser réclame une certaine force de persuasion, dans le ton et dans la poigne ! Ils nous testent et déjà se révèlent des individus à part entière du groupe, attachants, avec leurs caractères marqués.

GR70 Sentier StevensonSi nous voulons arriver ce soir à l'étape malgré l'heure tardive du départ et la longueur de l'étape, mieux vaut avancer régulièrement sans trop de pauses car à chaque fois, la remise en route ne va pas de soi. L'environnement se modifie en approchant de la Loire, les rochers prennent la place de la terre, pins et genêts s'emparent de terrains plus secs ou des pentes descendant vers le « fleuve ». Est-ce bien la même eau, souvent admirée, qui s'étale tranquillement, juste animée par le mouvement vertical des marées dans l'estuaire de Nantes à l'océan ? Cette rivière sauvage est-elle la même qui porte l'agitation des ports, les bateaux de pêche et les géants des mers s'envolant des chantiers navals de Saint-Nazaire ? Je réalise qu'elle lie mes deux racines, Massif Central et Loire-Atlantique. Si le ciel l'avait permis, sans doute aurions-nous aperçu le Mont Gerbier des Joncs qui lui donne vie.

Le village de pierre de Goudet et son eau nous attire en bas, d'autant que le soleil est sorti. Une date confirme qu'il ressemble sans doute encore à celui qu'a vu Robert Louis Stevenson 135 ans avant, en plus désert, nous n'y croisons presque personne. Stevenson, lui, est un peu avec nous et nous vivons ses impressions avec les nôtres grâce à un peu de lecture par Renée.

Après le pont, une pelouse nous attend pour une pause au bord de l'eau, c'est qu'il faut que nous pensions aussi au pique-nique des « porteurs ». Attachés chacun à leur pin, ils ont tôt fait de dessiner un rond parfait autour du tronc et nous les déménageons en cours de pique-nique. Repartir demande quelque temps car il faut composer à nouveau un harnachement équilibré, mais déjà, l'expérience du matin rend la coopération plus efficace.

Plateau Haute-LoireEn passant sous le château, il faut monter, et après encore alors que le soleil déjà nous réchauffe. Les espaces de cultures sont moins fréquents et les champs plus grands de ce côté-ci. Nous montons en regardant derrière les arrondis verdoyant du Velay couverts de carrés de cultures sur ses bosses, au loin mélangés avec le ciel laiteux et les nuages mouvants. Nous traversons peu de villages, un où nous passons sous la route nationale sans que Keneth et Popov ne soient autrement troublés par le petit tunnel, quelques personnes dans des hameaux ; la présence des ânes entraîne aisément quelques échanges. Le groupe s'étire car ceux qui n'ont pas les ânes, et des sacs plutôt légers grâce à eux, ont les jambes en mal d'exercice et pas de freins pour ralentir leur hâte. Même les ânes n'ont pas une allure identique ce soir-là.

Pourtant, à l'approche du Bouchet-Saint Nicolas, ils auront séparément la même accélération dans une côte, nous tirant alors que tout le jour il a fallu renouveler les encouragements à leur encontre ! Prémonition d'arrivée ou farce démonstrative au marcheur fatigué dans la côte, Popov en tout cas a repris ensuite son allure tranquille en regardant le village, sans se presser vers la liberté du pré. Surprise, le gîte municipal réservé est occupé par un acteur et son équipe qui ont commencé ce même jour le Chemin de Stevenson, ayant programmé à chaque étape un spectacle théâtral tiré de l'ouvre. L'acteur marche avec un âne et les deux techniciens transportent le matériel et le montent.

Pour nous, ce soir nous sommes trop tard pour assister à la séance et nous devrons dormir entassés sur des lits de camps sans ressorts dans une pièce froide sous le gîte, imprévu pour un brin d'aventure.

Débâtés, les ânes doivent être traînés vers le pré. Le maire, exploitante agricole, doit les aimer car elle a clôturé des morceaux de ses propres terrains à disposition des randonneurs et de leurs compagnons. Laurent et moi, chacun avec notre âne partons à la recherche de ces « gîtes ». Il y a bien deux ânes chacun déjà dans leur enclos, dont un grand blanc que nous recroiserons sur le chemin, mais c'est en rentrant dans une étable où quelqu'un travaille que nous connaîtrons le bon lieu pour nous. C'est d'ailleurs un réel plaisir que de croiser ce moment de vie, la traite du soir. Les vaches alignées broutent le foin devant elles tandis que ronronne la trayeuse.

Bouchet St NicolasLe Bouchet St Nicolas respire une vraie vie contrairement à d'autres, non rénové pour des temps passagers voir artificiels de week-end ou de vacances, ses maisons, ses granges non arrangées, entourées de matériels, ses rues marquées par la boue des labours ou le passage des vaches sont vivantes. Maisons et étables sont habitées, et c'est tant mieux s'il n'a pas le confort touristique habituel ; il est « vrai ».

Il en est de même pour l'auberge et l'accueil du couple de propriétaires ; seuls clients dans de grandes pièces au décor sans prétention, la simplicité marque de charme ce premier dîner. Keneth et Popov une fois lâchés, indifférents et heureux à la fois, philosophes, peut-être, nous ont laissés. Cependant, une promenade digestive ayant conduit certains d'entre nous à s'enquérir de leur bien-être dans la nuit, à l'appel ils ont répondu et sont venus nous montrer leur bonne santé. Pourtant, nous, frigorifiés par un vent froid, vite sommes allés vers les lits trouver refuge. C'est un peu tôt pour moi, surtout avec toutes les nouveautés de cette étonnante journée à l'esprit. Je ressors et m'éloigne des voix des acteurs qui plient leur matériel au-dessus.

La nuit tout autour, sur les lumières de la longue rue, entre les maisons sombres, sous le vent et dans le bruissement des arbres rafraîchit corps et esprit. La longue rue s'enfuit du village étalé et derrière l'église continue vers la nuit et le cimetière, dans le sifflement du vent, vers un monde différent, triste et fascinant, le monde qui a crée la Bête du Gévaudan dans l'esprit des hommes, un monde existant avant et hors de l'Homme, un monde intrigant, attirant à la fois. Peu rassurée, je ne dépasse pas beaucoup la lumière et reviens au chaud retrouver mon corps refroidi et poser mon esprit vagabond tandis que la lune se révélant voit défiler les nuages voyageurs, devant elle, sous le vent.

Bouchet St Nicolas GR®70 StevensonDeuxième jour: 19,5 km, +370m
Ce premier matin démarre tristement, réveillé de bonne heure par le mécontentement de Renée qui ne peut accéder à l'unique douche car les voyageurs au-dessus en s'enfermant en ont empêché l'accès. Et tout le monde ainsi brusquement réveillé se lève à une heure bien raisonnable et je pars, je m' « enfuis » à petite foulée vers le lac cratère à quelque distance du village ; l'ayant aperçu lors d'une reconnaissance cet été, j'avais apprécié la courbe nette de ses rives entourées de pelouses et de pins. Cela aurait été bien que tous l'admirent, mais hier le temps était trop court, ce matin aussi, d'ailleurs, même en trottinant, je n'irai pas tout à fait jusqu'au bord et rebrousse chemin avec la mauvaise conscience d'avoir laissé le groupe.

Cloche sur le GR®70 StevensonAu moins, le spectacle silencieux du matin enchanteur rend l'humeur heureuse. Les nuages navigants dans le ciel gris laissent passer des lueurs rousses, faux espoir de beau temps. La journée est froide, pluie et bruine vont en accompagner une partie. Petit déjeuner à grand renfort de flûtes de pain dont nous demandons un échantillon de la veille sec, c'est que Popov et Keneth ont aussi droit à un petit déjeuner, même si à cette saison l'herbe peut leur suffire, et surtout, vont-ils se laisser attraper par les inconnus que nous sommes ? Et bien oui, sans même leur donner le pain, ils viennent vers Pierre, Laurent et moi partis les chercher pendant que les autres bouclent les sacs. Ils sont heureux de nous voir semble-t-il, bien que le pain soit aussi apprécié.

Hier matin, c'est d'une oreille distraite que j'avais écouté Gilles Romans me citer les signes distinctifs des robes des deux ânes, heureusement que les informations se sont logées quelque part dans ma tête car les distinguer quand ils n'ont plus même le licol n'est pas très évident ; nous allons ainsi pouvoir rendre à chacun son propre équipement. C'est bien pour qu'ils ne se transmettent pas d'éventuels problèmes cutanés et parce qu'en ce début de périple, le licol et la couleur des sacoches sont pour la plupart des participants les éléments d'identification.

Croix sur le GR®70 StevensonLa traversée du village pour revenir vers le gîte communal de l'autre côté près de l'église est aisée, pas de creux à l'estomac et pas de convoitise au long des rues ; peut-être nos compagnons quadrupèdes ont-ils même envie de marcher ?

Tout est prêt pour les bâter quand nous arrivons ; cela va prendre quand même un peu de temps car pour l'instant, personne d'autre que moi ne l'a vu faire. Il faut curer les sabots, brosser, poser le tapis puis le bât, bien le fixer, enfiler les sacoches en cuir, la noire pour Keneth avec son licol vert, la marron pour Popov assortie à son licol noir. Et ne reste plus qu'à charger de façon équilibrée.

Parfois, surtout les premiers jours, nous devrons réintervenir en cours de marche après la constatation de certains penchants ou la perte du sac fixé en travers au-dessus du tout !
Déjà, la veille, Christian, Philippe, Laurent avaient beaucoup participé à la conduite des « équipages », surtout de Popov car Keneth plus sage en apparence s'était vite révélé plus difficile à remettre dans le droit chemin, ce qui me convint bien car accorder plus d'attention à Keneth m'avait vite donné plus d'efficacité et attachée particulièrement à lui. Pourtant, à la fin du séjour, je ne peux pas dire en fin de compte que je préfère l'un ou l'autre malgré la grande différence de temps que je leur ai donné ; ils sont différents, c'est tout, attachants tous deux.

Paysage du GR®70 StevensonEn tout cas, dès ce premier matin, la participation de chacun s'accroît. L'étape devrait avoir une durée raisonnable puisque contrairement à Stevenson nous n'irons pas jusqu'à Langogne, le gîte du soir étant retenu à Pradelles ; rendez-vous est donc pris pour plus tard avec Christophe Chaumette et la compagnie Samourailles. Eux respectent scrupuleusement les étapes de notre illustre prédécesseur mais si aujourd'hui, notre chemin est raccourci, il est prévu ultérieurement de grouper certains tronçons, donc, nous les rattraperons.

Ce matin, nous démarrons séparément pourtant, nous nous reverrons et aurons l'occasion de parler de R. L. Stevenson, de théâtre, d'ânes un peu plus loin, notamment aux alentours de Landos.

Le paysage est plus ouvert que la veille, malheureusement, le ciel est dans un jour pluvieux et ponchos ou vestes Gore-Tex utiles à certaines heures. Le pays est surtout plat, l'habitat est regroupé dans les villages si bien que nous avançons un peu en plein désert. Or, une petite tente est dressée non loin de beaux chevaux blancs qui ont couru vers nous, crinières au vent.

Amis de l'acteur rencontré, un couple de parisiens a passé là la nuit et, rebuté par la froideur du vent s'apprête à reprendre la route de la capitale. Avec leur origine, leur regard sur ce lieu, leur tente dans le vent, eux aussi vivent un peu la démarche de Stevenson, -une nuit fraîche en pleine nature sous la pluie-, aventure autant que nous ou la troupe et nos gîtes réservés, notre marche programmée.
Plus loin, nous trouvons l'ânesse blanche et le comédien, et aussi trois belges qui ont fondé une association Stevenson et parcourent le chemin pour alimenter leur site Internet en photos et préciser les indications topographiques. Avec nos ânes en vedettes, nous devrions y figurer. La croisée de nos chemins passe justement au pied d'une croix du Velay.

PradellesAvec eux nous marchons quelques temps, presque jusqu'au château de Jagonas dont ils nous décident à faire un détour pour l'admiration. Pour le coup, après avoir tenté d'en voir plus en se perchant sur des murets proches, vieux comme les maisons autour, nous découvrons le portail ouvert, et voici nos ânes et nous sur l'herbe devant la façade pour un court moment car la pluie ne fait pas du lieu un endroit idéal pour une pause et encourager nos ânes au menu larcin d'un peu d'herbe verte ne me convient pas vraiment, les en empêcher relève de l'utopie !

Un toit serait aussi préférable pour le déjeuner car depuis quelques temps, ponchos ou Goretex font un écran entre la bruine et nous, efficace en marchant, mais la température va se révéler fraîche en s'arrêtant plus longtemps. Alors, notre route se poursuit en quête d'un abri entre des prés bien verts et des murets agrémentés de frênes.

Une boule blanche, un champignon en réalité attire le regard dans l'un d'eux, surtout celui de Christian qui croit jouer au ballon avec une énorme vesse de loup ! Il confie alors Popov à Gisèle et pour la première fois, sa main efficace entraîne le quadrupède ; je suis ravie car Gisèle, à Toulouse était parmi celles qui avait dit n'y rien connaître et ne pas avoir l'intention d'y toucher.

GR70 Stevenson Haute-LoireUne légère montée conduit à un contour du chemin ouvert sur un paysage étendu, le ciel plus clément donnerait envie à plusieurs d'entre nous de s'y arrêter pour nourrir regard et corps en même temps, à côté de Christophe, le marcheur comédien et de Capucine, son ânesse, déjà « attablés » ; un courant d'air fait clapoter l'idée en assombrissant certains de nous. Juste après, un hameau aux trois maisons éparses offre suffisamment d'espace autour de la place d'herbe qui les sépare pour qu'en trois groupes chacun trouve son bonheur : les ânes au milieu, déchargés des sacs, les plus frileux sous un auvent et les amateurs d'espace ne craignant pas l'air humide sur un muret avec les ramures d'un frêne pour plafond, distrayant les habitants de la maison voisine dont le regard passe derrière le mouvement d'un rideau. Cet « éparpillement » n'empêchera pas comme toujours le partage de quelques denrées, et, élément précieux à mon goût, de l'eau chaude pour le café ! Et nous assisterons au défilé de nos compagnons de fortune, tous ceux que nous avions passés le matin, décidément présents ce jour, reprennent la tête pendant notre arrêt déjeuner.

Dès la reprise, une certaine distance se creuse car un sympathique échange comparatif sur l'élevage laitier entre Velay et Nord-Aveyron me retient près d'un agriculteur du hameau. Je mettrai un certain temps à rejoindre Laurent qui a fait une pause photographie de champignons, coulemelles plus précisément, et du lac de Naussac dont la surface brillante se détache dans le paysage humide et végétal, de l'autre côté d'une large vallée. Les ânes, loin devant, sont menés par Philippe, Christian et Pierre, de plus en plus investis dans leur conduite. Annie, ayant fait une pause de son côté, manque une bifurcation et allonge du coup son itinéraire du jour, me fait faire un petit footing pour éclaircir sa disparition entre l'avant-garde et l'arrière-garde du groupe. Et, au-delà d'un certain sentiment de culpabilité devant ma gestion un peu trop libre du groupe, donne raison à Philippe car nous arriverons 5 minutes après l'horaire limite prévu pour la victoire d'un pari ; 17h30 maximum, avais-je dit, et bien non, la bouteille de vin d'Alsace sera pour moi, mais, Annie n'est pas fâchée de son aventure, c'est le principal !

Une descente dans une forêt sombre de résineux débouche sur Pradelles et ses maisons de pierres ; je pense encore à Stevenson me demandant sa propre vision à ce moment. Il n'en a pas fait une ville-étape, est-ce parce que ce lieu ne lui a pas parlé ou simplement parce que ce jour-là il disposait encore de temps ?

GR70 Stevenson PradellesPour moi, j'aime ses vieilles rues, leurs instincts de survie malgré les maisons à vendre, et surtout, la petite ville représente comme un point de départ, le premier contact avec une future réalité de l'idée de notre périple par les échanges téléphoniques avec le propriétaire de nos ânes au printemps, une découverte paisible accompagnée par Maman en été, la rencontre effective de Gilles Roman et de ses ânes, hier matin seulement. Même pas deux jours, et pourtant, dans l'esprit, ce voyage a déjà fait beaucoup de pas depuis hier.

Avec nos deux ânes sur le trottoir avançant vers la place centrale puis par les vieilles ruelles en pente vers le gîte d'étape, nous pourrions être un petit trait d'union entre deux époques. Le déchargement est plus rapide que la veille, nous nous « rôdons », Keneth et Popov rejoignent leurs congénères habituels dans un grand pré accompagnés par leur maître habituel suivi de Laurent et moi. Fort de notre « petite » expérience, exemple et conseils du professionnel sur la relation homme/âne frappent plus notre attention. Le gîte plus fastueux attire repos, douches ou lessive des uns, tandis que d'autres découvrent les rues et font quelques emplettes.

Le café-restaurant de Gilles Romand progressivement regroupe tout le monde alors que la nuit, le froid et la pluie recouvrent la ville. Le sujet « âne » reviendra tout au long du repas avec les allers et retours de notre hôte et les discussions embrayées entre autre par le pari perdu s'étirent avec l'arrivée de mon frère Denis en train et en stop de Paris pour rentrer ici dans notre aventure Stevenson. Un petit tour nocturne dans le froid agrémente le retour au gîte, nous menant par le point culminant de la petite ville jusque vers ses bas-fonds.

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L'Etoile Maison d'hôtes à La Bastide Puylaurent entre Lozère, Ardèche et Cévennes

Ancien hôtel de villégiature avec un magnifique parc au bord de l'Allier, L'Etoile Maison d'hôtes se situe à La Bastide-Puylaurent entre la Lozère, l'Ardèche et les Cévennes dans les montagnes du Sud de la France. Au croisement des GR®7, GR®70 Chemin Stevenson, GR®72, GR®700 Voie Régordane (St Gilles), Cévenol, GR®470 Sources et Gorges de l'Allier, Montagne Ardéchoise, Margeride et des randonnées en étoile à la journée. Idéal pour un séjour de détente.

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